Je ne sais pas comment raconter Sinéad sans partir dans tous les sens. Et je crois qu’il y a des disparitions artistiques qui nous laissent un peu orphelin et sans voix. Alors je raconterai une émotion, un moment de mon adolescence qui a bouleversé pour toujours ma sensibilité musicale.

J’avais 17 ans (ou peut-être 18), et je passais de nombreuses heures, allongé sur mon lit, avec mon Walkman Sony et mes écouteurs. J’écoutais la radio, presqu’endormi. J’ai alors été alerté par une voix, un air familier. Je suis sorti de ma torpeur languissante et j’ai reconnu la mélodie. C’était une reprise de Sacrifice de Sir Elton John, une reprise acoustique sur fond de harpe. La chanson m’a envoûté, je me suis redressé, incapable de mettre un nom sur la voix. J’ai d’abord cru qu’il s’agissait de Dolores O’Riordan. Je n’ai compris que plus tard qu’il s’agissait de Sinéad O’Connor. Elle faisait pourtant déjà partie de ma culture musicale. J’ai mis ça sur le compte de mon état de demi sommeil.

J’avais peut-être 18 ans, et je découvrais une voix qui allait m’envouter pendant des années. J’ai aimé tous ses albums, tous ses concerts. Dans mes moments de doute et de tristesse, je passais un CD de Sinéad, c’était comme un remède musical. J’ai probablement fait suer mes amis avec Gospel Oak, qui reste à ce jour mon album préféré de la chanteuse. J’ai insisté l’année dernière pour aller voir à Londres Nothing compares, le documentaire sur sa vie. Mon conjoint, écossais, n’y tenait pas tellement, mais il n’a pas vraiment eu le choix : « Si, tu viens ! ». Il a été bouleversé par le film. A la fin, il a quitté la salle en pleurant. Les souvenirs avaient afflué, de son enfance, de sa vie. Il avait enfin compris l’histoire de cette femme irlandaise, lui-même écossais, leurs souvenirs s’entrechoquaient.

J’ai aimé chaque instant musical passé avec Sinéad. Je n’ai qu’un regret, je ne l’ai jamais vue sur scène. Elle a apporté au monde de la musique un cri, un message, un espoir aussi. Et moi, elle continue de bercer mes doutes et mes insomnies. Comme je suis triste ma petite Sinéad, il n’y avait vraiment rien comparé à toi. Merci pour la musique, merci pour ces voyages !

Jérôme

Catégories : Galerie

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